La diffusion des TBI
Le titre de l'article est assez parlant. En fait il s’agit d’un état des lieux exhaustif et sans voiles sur l’utilisation et la diffusion des Tableau Blanc Interactifs. Les donné se basse sur une étude de Thierry Karsenti .
Il faut d’abord rappeler l’ampleur de phénomène. Dans les pays anglo-saxons et en particulier au Royaume Uni le 100% des salles de classe est équipé d’un TBI.
De l’autre côté de l’Océan, les Etats-Unis arborent un 60% et le Québec n’en fait pas moins avec son taux qui atteint le 97%.
Dans le Vieux Continent les Pays-Bas en sont aussi au 60% des salles de classe et en Allemagne à 22%.
Le choix d’installer des TBI
D’où vient donc tout cet engouement pour un produit assez nouveau qui n’a pas encore fait ses preuves ? Et pourquoi les décideurs, les politiciens, les instances locales, depuis quelque temps soutiennent-ils l’implantation de tels dispositifs technologiques ?
Voilà la réponse qu’apporte Karsenti : « Dans tous ces pays, le TBI est apparu comme un outil révolutionnaire susceptible d’augmenter la réussite éducative ou scolaire des apprenants, en améliorant la pratique pédagogique des enseignants, en diversifiant la nature des ressources pédagogiques (graphiques, vidéo, audio, etc.) et en augmentant l’interactivité des activités d’enseignement/apprentissage ».
L’autre élément dont il faut aussi tenir compte est le discours très offensif des constructeurs qui vantent génériquement les bénéfices de leurs appareils sans vraiment se baser sur aucune étude sérieuse.
Les TBI dans les mains des enseignants
Par contre, en ce qui concerne la didactique, les choses se gâtent.
L’étude montre que la majorité des enseignants ne servent jamais (13 %) ou rarement (39 %)
Pour ce qu’il en reste, les usages par les élèves sont rarissimes (4 % des enseignants) ainsi que les usages interactifs. 1 % des enseignants utilisent le TBI pour faire des exercices interactifs, 5 % pour des démonstrations en maths. 1 % l’utilise en soutien d’exposés des élèves. « Nos résultats sur les usages du TBI illustrent que les enseignants s’en servent surtout comme projecteur électronique et que les fonctions interactives semblent rarement utilisées (1,4 % des usages rapportés). »
Le pourquoi de la sous-exploitation des TBI
La vraie et profonde contradiction que relève Karsenti est le fait d’imposer cet outil qui installe un usage frontal avec les élèves dans des systèmes éducatifs qui préconisent une autre pédagogie.
Et si cela ne suffisait pas, le 93 % des enseignants trouve cette technologie trop complexe les obligeant, de facto, à une double préparation pour faire face à un risque de panne.
Le résultat est assez criant et condamne définitivement les politiques d’implantation massive de matériel numérique. En définitive l’idée magique de pouvoir faire venir Internet dans la classe et ainsi d’innover, n’était pas si brillante qu’on le prétendait.
Pourquoi donc les enseignants n’ont-ils pas su ou pas voulu intégrer les TBI dans leur didactique ? Voilà la réponse que Kasseti donne au Café pédagogique: « Il y a bien un déficit de formation qui explique que les enseignants n’utilisent qu’une partie des fonctionnalités du TBI. Il y a aussi des formations inadaptées. Les enseignants ont aussi besoin de temps pour s’exercer et pour réfléchir en équipe aux usages et particulièrement aux usages interactifs. Or il n’y a pas eu suffisamment de temps accordé pour cela.
Mais il y a eu aussi une résistance. Car le TBI a été imposé. Il n’a pas été choisi par les enseignants. Certains ont été ravis de revenir à l’école en septembre et de découvrir un TBI. Mais le TBI est un outil complexe, qui pose des problèmes techniques. Certains enseignants ont vu dans son imposition dans les classes une atteinte à leur liberté pédagogique. C’est un fait majeur.
Du côté des élèves ont souligné aussi la petite taille de l’écran, trop faible par rapport à celle des classes. On a pu parler de frustration des élèves. »
Mais finalement, quelle solution aurait-il été alors profitable d’envisager ?
La réponse de Karsenti est assez claire : « On aurait pu tirer beaucoup plus de profit en mettant dans les classes des ordinateurs avec des vidéoprojecteurs. Et les enseignants n’auraient pas eu l’impression qu’on leur impose quelque chose ».
Cet article est un extrait du « Fait du jour » du Café pédagogique du 1er mars 2016